nombre dor

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LE NOMBRE D’OR EN MA TH ´ EMATIQUE Pierre de la Harpe 1er novembre 2008 ABSTRACT. This is a popularization essay of mathematics, in French, about the number known as the golden ratio:  ϕ 1.61803 ··· . Sev eral denit ions of this number are shown to be equiv alen t. The golden ratio is then shown to be releva nt to some elementary geome tric problems (proportions in a regular pentagon), and also to arithmetic considerations of both elementary and more advanced nature (diophantine approximation, Hilbert’s 10th problem). The mathematical background expected from the reader varies a lot from place to place. R ´ ESUM ´ E. Texte de vulgarisation math´ ematique ` a propos du nombre d’or  ϕ ≈  1.61803 ··· . On y montre d’ab ord l’´ equivalence de plusieurs d´ enitions de ce nombre. Puis on ecrit le ole du nombre d’or dans divers probl` emes eom´ etriques (proportions dans un pentagone egul ier ), ainsi que dans diver ses consid´ erations ari thm´ etiq ues ´ el´ ement air es et plus avanc´ ees (approximation diophantie nne, 10` eme probl` eme de Hilbert ). Les pr´ erequis math´ ematique s sous–entend us varient consid´ erableme nt de place en place. Chic J’ai Compris L’essentiel Et c’est pour demain Si l e dia ble est da ns l es d´etails 1 Un choix de d´ eniti ons En math´ ema tiqu es, le nombre d’o r pe ut ˆ etre eni de plusieu rs mani` eres , di´ erente s, mais toutes ´ equivale ntes au sens o` u elles enis sen t le eme nombre. Le choix des enitions qui suivent, ainsi que leur ordre, rel` eve donc d’une bonne dose d’arbitraire. eni ti on 1.  Le nombre d’or est le nombre ϕ  = √ 5 + 1 2  . La notation choisie, la lettre grecque  ϕ, prononcer “”, est l’un des usages courants (un autre est  τ , prononcer ` a mi–chemin entre “tau” et “tao”). Certains auteurs arment que le choix de  ϕ  honor e le scul pteu r grec Phi dias , du V`eme si` ecle avant J´ esus –Chr ist. 1 Un b est un po` eme de 6 vers compt ant 20 syllabes, les 6 vers ayant dans l’ordre 1, 1, 2, 3, 5 et 8 syllabes. Wikip´ edia mentionne l’existence de bs en sanscrit remontant ` a plus de 2000 ans. Pou r un site de bs, dus ` a Marc Lebel, voir http://mlebelm.ca/index.php?Fibs-a-la-bonacci

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  • LE NOMBRE DOR EN MATHEMATIQUE

    Pierre de la Harpe

    1er novembre 2008

    ABSTRACT. This is a popularization essay of mathematics, in French, about the numberknown as the golden ratio: 1.61803 . Several definitions of this number are shown tobe equivalent. The golden ratio is then shown to be relevant to some elementary geometricproblems (proportions in a regular pentagon), and also to arithmetic considerations of both

    elementary and more advanced nature (diophantine approximation, Hilberts 10th problem).

    The mathematical background expected from the reader varies a lot from place to place.

    RESUME. Texte de vulgarisation mathematique a` propos du nombre dor 1.61803 .On y montre dabord lequivalence de plusieurs definitions de ce nombre. Puis on decrit le

    role du nombre dor dans divers proble`mes geometriques (proportions dans un pentagone

    regulier), ainsi que dans diverses considerations arithmetiques elementaires et plus avancees(approximation diophantienne, 10e`me proble`me de Hilbert).

    Les prerequis mathematiques sousentendus varient considerablement de place en place.

    ChicJaiComprisLessentielEt cest pour demainSi le diable est dans les details1

    Un choix de definitions

    En mathematiques, le nombre dor peut etre defini de plusieurs manie`res, differentes,mais toutes equivalentes au sens ou` elles definissent le meme nombre. Le choix desdefinitions qui suivent, ainsi que leur ordre, rele`ve donc dune bonne dose darbitraire.

    Definition 1. Le nombre dor est le nombre

    =5 + 12

    .

    La notation choisie, la lettre grecque , prononcer fi, est lun des usages courants (unautre est , prononcer a` michemin entre tau et tao). Certains auteurs affirment quele choix de honore le sculpteur grec Phidias, du Ve`me sie`cle avant JesusChrist.

    1Un fib est un poe`me de 6 vers comptant 20 syllabes, les 6 vers ayant dans lordre 1, 1, 2, 3, 5 et 8

    syllabes. Wikipedia mentionne lexistence de fibs en sanscrit remontant a` plus de 2000 ans. Pour un site

    de fibs, dus a` Marc Lebel, voir http://mlebelm.ca/index.php?Fibs-a-la-fibonacci

  • 2 PIERRE DE LA HARPE

    Approximations decimales. Pour les flemmards : de 4 < 5 < 9, on deduit dabord2 0 et posons L = `. On verifie facilement que L+`L =L` = , de sorte que

    est bien le nombre de la definition 3.

  • LE NOMBRE DOR EN MATHEMATIQUE 3

    Faisons dabord de la geometrie ...

    Proposition 1. Dans un pentagone regulier dont les cotes ont longueur 1, les diagonalesont longueur .

    Demonstration. Considerons un pentagone regulier de sommets P,Q,R, S, T , dont les cotesont longueur

    long(PQ) = long(QR) = long(RS) = long(ST ) = long(TP ) = 1.

    Les cinq diagonales ont aussi meme longueur, que nous notons :

    long(PR) = long(QS) = long(RT ) = long(SP ) = long(TQ) = .

    Il sagit de montrer que = .INDISPENSABLE : dessiner une figure en lisant la suite !

    Premie`rement, notons U lintersection des diagonales QS et RT . Les triangles UTQ etURS ont leurs cotes paralle`les deux a` deux ; ils sont donc semblables, et on a

    long(QU)long(US)

    =long(QT )long(RS)

    = .

    Deuxie`mement, le quadrilate`re PQUT est un losange (cotes opposes paralle`les et de memelongueur) ; par suite :

    long(QU) = long(PT ) = 1.

    Il en resulte quelong(QS)long(QU)

    =long(QS)long(PT )

    = =long(QU)long(US)

    .

    Vu la definition 3, on a bien = . Cette proposition montre donc lequivalence des definitions precedentes avec la definition

    suivante.

    Definition 4. Le nombre dor est le rapport entre la longueur des diagonales et la longueurdes cotes dans un pentagone regulier.

    Remarque. Le nombre dor apparat ainsi de manie`re tre`s simple dans une figure, lepentagone regulier, qui a exerce depuis la nuit des temps une tre`s grande fascination. Ladecouverte du fait que ce nombre soit irrationnel (voir plus bas) fut un choc considerablepour les geome`tres de la Gre`ce ancienne ; voir [OsWa].

    Exercice. Si vous savez ce quest un cosinus, montrez que

    2 cospi

    5= .

    [Indication : dans un pentagone regulier dont les cotes ont longueur 1, on trouve un trianglerectangle dont lhypothenuse est de longueur 1 et un cote de langle droit de longueur /2.]

    Remarque, pour les lecteurs qui savent manipuler lexponentielle dun nombre complexe.Voici une autre manie`re de demontrer la relation de lexercice precedent : si z = e2ipi/5

  • 4 PIERRE DE LA HARPE

    et =(z + 1z

    )= 2 cos(2pi/5), alors z4 + z3 + z2 + z + 1 = 0 et 2 + 1 = 0, et par

    suite cos(2pi/5) =514 . On en deduit dabord que 2 cos

    2(pi/5) = 1 + cos(2pi/5) = 3+5

    4 ,

    et finalement que 2 cos(pi/5) =

    3+5

    2 =1+5

    2 = .

    Voici une traduction trigonometrique des quatre lignes qui prece`dent, sans nombre com-plexe.

    Choisissons lorigine du plan au centre du pentagone, et notons ses sommets dans lordrecyclique : z0, z1, z2, z3, z4. Montrons dabord que la somme S = z0 + z1 + z2 + z3 + z4 deces quatre vecteurs est nulle.

    En effet, la moitie de la somme de deux sommets consecutifs est le milieu du cote qui lesjoint, par exemple 12 (z0 + z1) = z3, ou` designe la distance entre lorigine et le milieudun cote. Par suite

    S =12(z0 + z1) +

    12(z1 + z2) +

    12(z2 + z3) +

    12(z3 + z4) +

    12(z4 + z0)

    = z3 z4 z0 z1 z1 = S,

    ce qui implique S = 0.Les coordonnees des sommets secrivent

    z0 = (1, 0)z1 = (cos 2pi5 , sin

    2pi5 ) z4 = (cos

    2pi5 , sin 2pi5 )

    z2 = (cos 4pi5 , sin4pi5 ) z3 = (cos

    4pi5 , sin 4pi5 )

    et S = 0 implique

    () 1 + 2 cos 2pi5

    + 2 cos4pi5

    = 0.

    Posons provioisrement x = 2 cos pi5 . Alors 2 cos2pi5 = x

    2 2 et 2 cos 4pi5 = (x2 2)2 2 =x4 4x2 + 2, de sorte que la relation () secrit

    1 + x2 2 + x4 4x2 + 2 = x4 3x2 + 1 = 0.

    A priori, on trouve les deux solutions x2 = 12 (35). Or le signe ne convient pas, car

    pi5 cos pi3 = 1 2 cos pi5 > 1 x2 > 1. On trouve donc bien x2 = 12 (3+

    5),

    et donc aussi x = 12 (1 +5) = , comme promis.

    Exercice. On conside`re dans le plan un cercle centre en un point O, deux rayons OP etOB perpendiculaires de ce cercle, le milieu D du rayon OB, la bissectrice de langle ODPqui coupe le rayon OP en un point N , la perpendiculaire a` OP en N qui coupe le cercleen un point Q, et le point symetrique T de Q par rapport a` la droite portant le rayon OP .

    Montrer que long(QT )long(PQ) = , cesta`dire que P , Q et T sont trois des cinq sommets dunpentagone regulier inscrit dans le cercle de depart.

    (La construction est celle donnee a` la page 27 de [Cox69] ; cest une variante de laconstruction dEuclide. Pour trouver la solution de lexercice, il faut bien sur commencerpar faire un dessin !)

    Remarque. Le nombre dor se retrouve naturellement dans plusieurs rapports de lon-gueurs qui apparaissent dans un dodecae`dre regulier, ce polye`dre de lespace qui posse`de

  • LE NOMBRE DOR EN MATHEMATIQUE 5

    douze faces dont chacune est un pentagone regulier, et vingt sommets en chacun desquelsse rejoignent trois faces.

    On retrouve ces memes rapports dans le polye`dre cousin qui est licosae`dre regulier ; il a20 faces qui sont des triangles equilateraux et 12 sommets en chacun desquels se rejoignent5 faces. Par exemple, les douze points de lespace de coordonnees cartesiennes

    (0, , 1), (1, 0, ), (, 1, 0)

    sont les sommets dun icosae`dre regulier.Ces deux polye`dres, et les trois autres polye`dres reguliers (tetrae`dre, cube, octae`dre)

    fournissent la matie`re du livre XIII (le dernier) des Elements dEuclide.

    Le nombre dor entre egalement dans la description des pavages de Penrose, ces fasci-nants recouvrements du plan par des paves decouverts vers 1970. Dans lune des vari-antes de ces pavages, chaque pave est un triangle isoce`le dont les angles sont ou bienpi/5, pi/5, 3pi/5, ou bien pi/5, 2pi/5, 2pi/5 (rappel : pour un angle, pi/5 = 36o). Lun desinterets de ces pavages, il en existe dinnombrables, est de ne posseder aucune symetrie detranslation.

    Mais ceci est toute une histoire, autre et superbe, qui necessiterait a` elle seule tout unenote, et nous nous bornerons ici a` signaler un article de Martin Gardner [Gar77] ainsique quelques sites oue`bes ou` en trouver davantage [Pen1, Pen2, Pen3].

    ... et ensuite de larithmetique

    Rappelons quun nombre (ou nombre reel) x est dit rationnel sil existe deux entiersa, b, avec b > 0, tels que x = ab . Une telle ecriture est dite reduite si les entiers a et b sontpremiers entre eux, cesta`dire sils nont pas dautre diviseur commun que 1. Ainsi, six = 1, 75, alors x = 74 est une ecriture reduite et les entiers 7, 4 sont premiers entre eux,alors que x = 148 nest pas une ecriture reduite puisque 14 et 8 sont 2 comme diviseurcommun.

    Il est facile de verifier que, pour un nombre rationnel x donne, il existe exactement unepaire reduite a, b telle que x = ab .

    Un nombre reel est irrationnel sil nest pas rationnel. Par exemple, si pi est defini2

    comme le rapport entre le perime`tre et le diame`tre dun cercle,

    pi 3, 14159 26535 89793 23846 ,

    on sait que pi est un nombre irrationnel ; la premie`re demonstration de ce fait, due a`Lambert, date de 1761. (On sait meme que pi est un nombre transcendant, ce qui futdemontre par Lindemann en 1882, et ce qui apporte la reponse moderne a` une questioncele`bre qui se posait depuis lantiquite grecque, a` savoir la quadrature du cercle, mais ceciaussi est une autre histoire.) De meme on sait que le nombre

    e = 1 +12!

    +13!

    +14!

    +14!

    +15!

    +17!

    +18!

    + 2, 71828 18284 59045 23536

    2Il y a bien sur dautres definitions possibles, par exemple pi est le rapport entre laire dun disque et

    le carre de son rayon.

  • 6 PIERRE DE LA HARPE

    est irrationnel (Euler, 1737 [Eul37]), et meme transcendant (Hermite, 1873). Autant queje sache, personne ne sait3 montrer que pi + e est irrationnel (a fortiori transcendant). Atitre de curiosite, voisi neanmoins un resultat recent qui impressionne les specialistes : lestrois nombres pi, epi et ( 14 ) sont algebriquement independants sur Q (Nesterenko, 1997,voir le chapitre 10 de [Rib00]).

    Proposition 2. Le nombre est irrationnel.

    Premie`re demonstration. Pour le montrer, on suppose que est rationnel, = ab avec aet b premiers entre eux, et on va arriver a` une contradiction.

    Posons c = 2a b ; on verifie que c et b sont encore premiers entre eux. Si5+12 =

    ab ,

    alors5 = 2abb =

    cb , cesta`dire

    (*) 5b2 = c2.

    Il en resulte que c2 est divisible par 5. Par suite (attention, cest le pointcle de lademonstration !), c est divisibie par 5 (de sorte que c2 est en fait divisible par 25). Ilexiste donc un entier f tel que c = 5f ; on peut reecrire (*) sous la forme 5b2 = 25f2, desorte que

    (**) b2 = 5f2.

    En repetant le meme raisonnement, on voit quil existe un entier g tel que b = 5g.En comparant les egalites c = 5f , b = 5g avec lhypothe`se impliquant que b et c nont

    pas de diviseur commun, on voit bien quil y a une contradiction ; cest donc lhypothe`sede lexistence dune paire a, b avec = ab qui est absurde. Seconde demonstration, esquisse. Supposons que = ab , avec a et b premiers entre eux.Notons dabord que les entiers a et b satisfont a > b. En utilisant la definition 3, on obtientaussi = bab , et il est facile de verifier que les entiers b et a b sont egalement premiersentre eux. Ceci est en contradiction avec le fait quun nombre rationnel (comme selonlhypothe`se faite au debut de cette demonstration) na quune ecriture reduite. Remarque. Largument de la premie`re demonstration montre egalement que les nombres2,3,5,6,7,8,10,

    11, . . .,

    2008, . . . sont irrationnels.

    [Il faut parfois un tout petit plus de reflexion, par exemple pour8.]

    Les autres proprietes que nous voulons decrire sont plus difficiles a` montrer, et nousnous bornerons ici a` les enoncer.

    Soit x un nombre reel irrationnel. Il est facile de se convaincre du fait que, pour tout > 0, il existe une infinite de paires (a, b) de nombres entiers premiers entre eux, pairestelles que x a

    b

    < .Cest un peu plus difficile de montrer un enonce plus fort : il existe une infinite de paires(a, b) de nombres entiers premiers entre eux telles que

    x ab < 1b2 . En fait, on sait mememontrer davantage.

    3Personne ne sait non plus montrer si, parmi les chiffres apparaissant comme decimales de pi (ou dee), la proportion de 0 (ou de 1, ..., ou de 9) tend vers 10%. Il serait facile de multiplier des questions

    de theorie des nombres qui sont tre`s simples a` formuler et dont personne ne connat la reponse ; il est

    autrement difficile de formuler les bonnes questions.

  • LE NOMBRE DOR EN MATHEMATIQUE 7

    Theore`me 3 (Hurwitz). Pour tout nombre reel irrationnel x, il existe une infinite depaires (a, b) dentiers premiers entre eux telles quex a

    b

    < 15 b2

    .

    Pour le theore`me de Hurwitz, voir4 par exemple, [HaWr79], chapitre XI, section 11.8.Pour le theore`me suivant, qui est une partie de resultats publies par A. Markoff (ou Markov)en 1879 et 1880, voir [Lev56, Theorem 9.10] et [Cas65 , Chapters I & II].

    Theore`me 4 (Markoff). (i) La constante5 est la meilleures possible dans linegalite

    du theore`me de Hurwitz. En dautres termes, laffirmation de ce theore`me cesse detrevraie si on y remplace

    5 par une constante C >

    5.

    (ii) Soit x un nombre reel irrationel. Les deux proprietes suivantes sont equivalentes :

    il est impossible de trouver une constante C >5 et une infinite de paires (a, b)

    dentiers premiers entre eux telles quex ab

    < 1C b2

    .

    il existe des entiers p, q, r, s tels que ps qr = 1 ou ps qr = 1 et

    (]) x =p+ qr+ s

    .

    (iii) Si x est irrationnel et nest pas de la forme (]), alors il existe une infinite de paires(a, b) dentiers premiers entre eux telles quex a

    b

    < 18 b2

    .

    De plus, pour certains nombres (par exemple x =2), il nest pas possible de remplacer

    8 par une constante plus grande.

    On pourrait continuer :5 et

    8 sont les deux premiers termes dune suite infinie

    5,

    8,

    221/5,

    1517/13,

    7565/29,

    2600/17,

    71 285/89,

    257 045/168,

    84 680/97,

    488 597/233, . . .

    qui tend vers 3. Ce sont tous des nombres de la forme9m2 4/m, ou` m est un entier

    strictement positif, et plus precisement ceux pour lesquels il existe deux entiers m1,m2tels que

    m2 +m21 +m22 = 3mm1m2.

    Les premiers de ces nombres m sont

    1, 2, 5, 13, 29, 34, 89, 169, 194, 233, . . .

    4??????? Voir aussi I. Niven, Irrational numbers, Carus Mathematical Monographs 11 (1967), Theorems

    6.1 et 6.2.

  • 8 PIERRE DE LA HARPE

    Ces resultats sont dus a` A. Markoff (articles de 1879 et 1880) ; le theore`me de Hurwitzenonce cidessus remonte a` un article posterieur [Hur91], mais dans lequel Hurwitz util-isait un argument plus direct. Voir [CuFl89] pour une presentation avec demonstrationsdes resultats de Markoff, et en particulier [CuFl89, page 2] pour quelques remarqueshistoriques.

    Les nombres de la forme p+qr+s avec p, q, r, s entiers et |ps qr| = 1 sont parfois appelesnombres nobles.

    Cette theorie des approximations rationnelles des nombres irrationnels est intimementliee a` la theorie des fractions continues, que nous nevoquerons que via le tre`s modesteexercice suivant.

    Exercice (fractions continues). La relation = 1 + 1 sugge`re lecriture (infinie !)

    = 1 +1

    1 +1

    1 +1

    1 +1

    1 +1

    1 +.. .

    a` laquelle les mathematiciens savent donner un sens rigoureux.Ecrire les fractions rationnelles

    1 +1

    1 + 1, 1 +

    1

    1 +1

    1 + 1

    , 1 +1

    1 +1

    1 +1

    1 + 1

    , . . .

    sous forme reduite.

    Remarque geometrique importante. Ces resultats de Markoff ont beau pouvoir ap-paratre comme le fin du fin de larithmetique, ils peuvent avec profit etre vus sous un aspectresolument geometrique, en termes de geodesiques sur une surface munie dune metriqueriemannienne, surface homeomorphe a` un tore a` un trou ou a` une sphe`re a` quatre trous[Ser85].

    Le nombre dor et la suite de Fibonacci.

    La suite de Fibonacci est la suite de nombres entiers F0, F1, F2, F3, . . . definie par

    F0 = 0, F1 = 1, Fk+2 = Fk+1 + Fk pour tout k 0.Ses premiers termes sont donc

    0, 1, 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, 34, 55,89, 144, 233, 377, 610, 987, 1597, 2584, 4181, 6765,10946, 17711, 28657, 46368, 75025, 121393, 196418, 317811, 514229, 832040,. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

  • LE NOMBRE DOR EN MATHEMATIQUE 9

    La terminologie se refe`re a` Leonardo da Pisa (vers 11701250), aussi dit Fibonacci (car filsde Guilielmo Bonacci). La suite qui porte son nom apparat dans son liber abaci (livre descalculs), publie en 1202 ; cest ce livre qui a fait connatre en Occident les chiffres indiens,dits aussi chiffres arabes, dun maniement considerablement plus simple que les chiffresromains utilises auparavant. Il semble que les nombres de Fibonacci etaient connus decertains savants indiens bien avant lepoque de Fibonacci.

    Cest sans doute Kepler (15711630) qui a le premier explicitement note que le rapportFk+1Fk

    tend vers quand k tend vers linfini, ou en dautres termes se rapproche de plusen plus de quand k devient de plus en plus grand. Par exemple :

    F3F2

    = 2,F4F3

    = 1, 5,F5F4

    = 1, 666,F6F5

    = 1, 6, . . . ,F10F9

    1, 6176, F11F10

    1, 6182, . . .

    Une manie`re de le montrer est detablir dabord la formule de Binet, qui remonte a` Euler[Eul65], et quon pourrait prendre pour une definition des nombres de Fibonacci :

    (]) Fk =15

    (k ()k) = 1

    5

    ((1 +52

    )k(15

    2

    )k).

    Il en resulte que5

    (*) limk

    Fk+1Fk

    = .

    Notons dabord que les approximations de par les quotients successifs de nombres deFibonacci sont alternativement par endessus et par endessous :

    1 =11